Controverses du XIXème siècle
sur la «Propriété Intellectuelle»

 

Belgique : loi de 1854 sur les brevets d'invention

Sources: "laChambre.be", Bayerische Staatsbibliothek München, etc.

En Belgique, les brevets d'invention relevaient avant 1854 d'une loi datant de 1817, c'est-à-dire de l'époque où la Belgique faisait partie du royaume de Hollande. La philosophie générale de cette loi était la conception traditionnelle du privilège accordé ou non par le souverain, dans le but d'implanter ou d'introduire de nouvelles industries à l'intérieur du royaume. Après 1830 et l'indépendance belge, les pratiques administratives avaient changé progressivement, et toutes les demandes de brevet étaient de fait systématiquement accordées, sans examen et sans refus. La rédaction d'ne nouvelle loi sembla cependant nécessaire, et une commission fut nommée en 1848 afin d'étudier la question et de proposer un avant-projet. Parallèlement, les Chambres de Commerce et les commissions prud'homales furent consultées.

Dans cette commission, présidée par un ancien ministre et juriste renommé, Jean François Tielemans, figurait aussi Ambroise-Marcellin Jobard, le directeur du Musée de l'Industrie de Bruxelles, un théoricien de la propriété intellectuelle dans sa forme la plus absolue, avec sa thèse du monautopole (1844)[1]. Jobard proposa donc de rédiger la nouvelle loi en fonction de cette thèse, et de faire du brevet belge une propriété perpétuelle, sur le modèle de la propriété foncière; mais cette proposition se heurta à une vive opposition. Comme l'écrit Tielemans dans le rapport qu'il présente en 1852 au nom de la commission, la «lutte a été longue, vive et passionnée». Le résultat fut le rejet du monautopole par la commission comme dans le projet gouvernemental et les débats parlementaires ultérieurs. Ce qui fut retenu, voté et promulgué en 1854, est simplement le principe d'une récompense à l'inventeur, avec un droit d'exploitation exclusive pour une durée limitée (20 ans, accompagné d'un système d'annuité progressives sous peine de nullité). La loi prit d'ailleurs comme références la loi française de 1844 et les évolutions de la législation des patents au Royaume-Uni.

On trouvera ici un dossier complet sur la production de cette loi, avec les documents suivants :

(1) Le rapport de Tielemans de 1852, au nom de la commission spéciale de 1848 (dont la première partie est entièrement consacrée à la critique du monautopole); ce rapport est accompagné par l'exposé des motifs et le projet de loi gouvernemental, plus quelques autres documents.

(2) Le rapport de Vermeire à la Chambre des Représentants au nom de la section centrale sur le projet de loi du gouvernement (1852).

(3) Les débats à la Chambre des Représentants (1853 et 1854).

(4) Les débats au Sénat (1854).

(5) Le texte de la loi de 1854, et de celle, complémentaire, de 1857.

I. Le rejet du monautopole

Dans la commission chargée de la préparation d'une refonte de la loi belge sur les brevets d'invention, «deux systèmes», selon l'expression du rapporteur Tielemans, se sont affrontés, le système du monautopole et une thèse opposée qui «reconnaissait à la société, ou plutôt à l'humanité entière, un droit primitif et inaliénable sur toutes les découvertes»; et n'envisageait alors que de «récompenser sûrement et loyalement les inventeurs du bien que leurs travaux procurent». La discussion de principe a été longue. «L'auteur de cette théorie nouvelle n'a rien négligé pour mettre notre commission à même d'en apprécier le mérite. Imprimée et distribuée d'avance, répandue à profusion et sous toutes ses formes depuis l'apologue jusqu'au projet de loi, flanquée d'adhésions chaleureuses, multipliées et presque officielles, il l'a présenté à notre examen avec tous les avantages qui peuvent imposer ou séduire, mais vainement; la commission n'a point accueilli le monautopole» (Tielemans, p. 657). Son principe fut rejeté clairement à une large majorité; et il en fut de même pour l'ensemble des Chambres de Commerce et conseils des prud'hommes consultés[2].

Tielemans consacre la première partie de son rapport à réfuter la thèse du monautopole, dont il résume assez fidèlement le principe. IL s'agit, selon son auteur Jobard, de faire cesser l'anarchie dans laquelle se trouve plongé aujourd'hui le monde industriel et commercial. Pour cela, il faut l'appropriation de toutes les industries et la responsabilité de leurs propriétaires. Il faut donc une propriété intellectuelle «perpétuelle, héréditaire, cessible et inviolable» sur les inventions, les perfectionnements, les importations ou les premières exploitations de procédés, de moyens, de produits, etc., plus une marque obligatoire sur chaque produit relevant du privilège.

Le champ de l'industrie, affirme Jobard, est largement demeuré en friche, parce que les inventeurs n'étaient pas propriétaires de leurs œuvres, et protégés. De plus, à côté des inventions nouvelles, ou des perfectionnements, «il existe dès à présent une foule d'inventions connues, décrites et même exploitées ailleurs, qu'on se garde bien d'exécuter dans notre propre pays, parce que le premier qui s'aviserait de la faire serait infailliblement ruiné par la cupidité de ses concurrents...». Le monautopole est donc un projet de «nouvelle économie sociale», un projet d'enclosure généralisée du champ de l'industrie, que Tielemans critique d'abord sur le plan historique puis philosophique.

Sur le plan historique, l'idée selon laquelle «toute invention est la propriété de son auteur» n'a jamais été reprise nulle part, par aucune législation ; et Tielemans rappelle en détail l'histoire de la législation anglaise (Statut des Monopoles, etc.), puis de la loi française (avec la Déclaration sur les privilèges en matière de commerce de 1762, et les lois de 1791[3] et 1844), pour conclure finalement : «L'histoire proteste d'une manière constante et invariable contre le principe qui sert de base au monautopole» (p. 659).

Par ailleurs, sur le plan philosophique, Tielemans tranche sans hésiter : «Les inventions ne peuvent être l'objet d'aucune propriété individuelle ou collective; ce sont des choses qui n'appartiennent à personne, et dont l'usage est commun à tous» (p. 660). Il y a ici une communauté positive directement rattachée par Tielemans au dominium terrae de la théologie, et à l'idée biblique de la création. «L'homme ne crée pas, il produit. Tout ce que l'industrie humaine emploie, force, matière ou forme, est donné originairement par la nature; l'homme n'y ajoute que son travail; il cherche, il combine, il applique les éléments que la nature tirent à sa disposition, et il en tire des produits. Ces produits, notre ignorance les appellent inventions ou découvertes, quand ils se montrent pour la première fois à nos regards; mais, pour sembler nouveaux, ils n'en existaient pas moins, dans les desseins de la Providence, comme moyens possibles et prévus de satisfaire aux besoins de l'humanité».

Des trois choses à distinguer dans la production de l'homme, c'est-à-dire les éléments qu'il utilise, le travail, et l'objet qui en résulte, seul l'objet peut appartenir en toute propriété à son auteur[4]. Les autres éléments relèvent du principe de la liberté. Mais ce que l'inventeur réclame, c'est «le principe, l'idée, l'abstraction de la chose», et donc «la force, la matière et la forme combinées d'une certaine façon»; c'est étendre le principe de la propriété au delà de ses limites, au détriment du principe de liberté. On peut noter combien cette analyse est différente de celle de Renouard (1860), qui affirme à l'inverse que «le capital intellectuel, propriété indivise de l'entière communauté humaine, est une création du travail...». En évoquant la simple découverte de choses déjà présentes «dans les desseins de la Providence», Tielemans rattache le communisme des idées et des inventions à cette partie du domaine terrestre qui est l'œuvre de Dieu et non des hommes, dans une approche plus traditionnelle, archaïque et religieuse que celle de Renouard[5].

A partir de là, Tielemans continue sa critique du monautopole en défendant la concurrence (malgré ses «abus») contre Jobard. C'est un «mécanisme régulateur des intérêts particuliers», et une grande loi de répartition des ressources que le travail arrache incessamment à la nature «pour satisfaire à l'accomplissement de la destinée humaine»[6].

Il débouche ensuite sur une critique plus terre à terre, et plus utilitariste aussi, du monautopole, en soulevant la question de la possibilité de l'établissement de celui-ci. Si la nature même de la terre, écrit-t-il, se prête bien à sa division en parcelles et à l'exploitation individuelle, il n'en est pas de même de l'industrie. «L'industrie, telle qu'elle est organisée maintenant, forme une espèce de fonds commun où chacun est libre de prendre l'instrument, le procédé ou l'objet qui lui convient; les inventeurs y puisent comme les imitateurs, et lorsqu'ils arrivent à produire un objet nouveau, ils se bornent à décrire les seules différences, les seules nouveautés qui le caractérisent; tout le reste est négligé par la raison qu'il n'appartient à personne» (p. 663). Leur brevet échu, les découvertes rentrent dans le fonds commun de l'industrie, et d'autres inventeurs peuvent alors s'en emparer à leur tour sans s'informer de leur origine et de leur propriété. «Dans le système que l'on propose, rien ne sera dans le domaine public; chaque objet d'industrie, chaque partie d'objet, chaque clou, chaque cheville aura son maître à perpétuité, et ce maître, intéressé, jaloux, susceptible comme un propriétaire, ne laissera rien passer qui puisse de loin compromettre ses droits. (...) Comment sera-t-il possible dans ce régime de faire une description qui touche de toutes parts à des objets déjà appropriés ? (...) Que serait-ce donc s'il fallait breveter tous les changements dont ils sont encore susceptibles ? (...) Il en serait de même de toutes choses, si l'on s'avisait de les approprier toutes; car dès lors il n'y aurait plus rien d'indifférent : un écrou, un boulon, une clavette seraient disputés comme une terre ou une maison» (p. 665).

Tielemans conclut que la société (et la loi) ne peut déposséder les hommes du droit naturel qu'ils ont sur toutes les inventions qui apparaissent dans le monde; elle ne peut qu'en régler l'exercice dans leur intérêt commun; et «la meilleure de toutes [les lois] sera celle qui fera naître le plus d'inventions tout en mettant le moins d'entraves à leur jouissance».

La longue dissertation «historique et philosophique» de Tielemans devait enterrer définitivement dans la discussion parlementaire le débat sur la propriété des inventeurs. Vermeire dans le rapport au nom de la section centrale pour la Chambre des Représentants tient le problème pour réglé, et signale simplement qu'un des membres de la section a bien proposé une durée de 100 ans, au lieu des 20 prévus au projet, mais que tous les autres s'y sont opposés. A la Chambre, en session plénière, le vote des premiers articles (dont cette durée limitée de 20 ans) a lieu sans aucune discussion, et les débats ne commencent réellement qu'après, quand on aborde le traitement des contrefacteurs, des brevets d'importation, ou des questions comme l'obligation d'utiliser le système métrique, les langues utilisables pour la rédaction du brevet, etc. Au Sénat, le seul à engager une discussion de principe est Forgeur, sénateur de Liège, qui propose, à l'opposé de la thèse de Jobard et des autres partisans de la propriété des inventeurs, la suppression des brevets, car «les brevets ne profitent à personne; ils sont, pour ainsi dire, une cause de ruine pour ceux qui les demandent ou bien une cause de vexation incessante pour ceux qui se trouvent en face du brevet» (séance du 4 avril 1854, p. 213). Forgeur refuse cette nouvelle loi, où le gouvernement va accorder sans examen les yeux fermés tous les brevets demandés, ce qui va donner «une nuée de brevets qui seront comme une plaie d'Egypte»; il se prononce à l'inverse pour un système de récompenses réservées aux seules inventions réellement utiles à la Belgique; et pour le reste, il pense qu'il faut suivre l'exemple de la Suisse...

II. Les différents projets de loi et les débats parlementaires

Le rapport de Tielemans comporte une seconde partie, plus technique, qui présente successivement les articles de l'avant-projet de loi élaboré par la commission. Au nom du gouvernement, le Ministre de l'Intérieur Charles Rogier ne devait en retenir qu'une partie; et la discussion à la Chambre des Représentants, à la section centrale (voir le rapport Vermeire), puis au Sénat, feront encore évoluer les choses. Il est intéressant d'analyser ici toute cette transformation.

La commission avait en effet imaginé tout un système nouveau, où le dépôt de la demande était suivi d'une publication permettant aux oppositions de se manifester, avec décision du ministère alors et procédure d'appel. En l'absence d'opposition cependant, le brevet était délivré automatiquement, et devenait inattaquable; il ne pouvait plus être annulé, en dehors de quelques cas de nullité. Jugeant que cette enquête préalable ne suffirait pas, le projet gouvernemental opte pour le système français, une simple délivrance sans examen, et sans garantie du gouvernement, la valeur du titre pouvant être alors contestée par les tiers devant les tribunaux. A l'inverse de ce qui était inscrit dans la loi précédente du 24 janvier 1817, la délivrance du brevet est cependant automatique (ce qui était de fait devenu déjà la pratique administrative).

Le gouvernement devait aussi refuser une espèce nouvelle de brevet ajoutée par la commission aux brevets d'invention, de perfectionnement et d'importation, les «brevets d'exploitation». Cette innovation était justifiée ainsi dans le rapport de la commission : «Il y a de vieux livres et d'anciens journaux où l'on trouve des applications, des procédés, des moyens utiles à l'industrie, mais oubliés depuis longtemps; il y a dans les recueils et les ouvrages modernes des inventions qui n'ont pas eu de suite; il y a des découvertes qui ont été suivies de brevets, mais qui sont tombées dans le domaine public avant d'être exécutées; et il y en a dont l'exécution n'a duré que peu de temps (...) Pourquoi n'essayerait-on pas de les mettre en œuvre par l'appât d'un privilège qui tenterait d'autres entrepreneurs sans nuire à des droits acquis ? La législation d'aujourd'hui s'y oppose parce que ce ne sont pas des industries nouvelles : il suffit qu'une invention ait été publiée une fois, n'importe en quel temps et en quel lieu, pour qu'elle ne soit plus brevetable. Eh bien ! La commission n'a voulu que lever cet obstacle, et elle croit l'avoir fait heureusement» (p. 674). A cela s'ajoutait, dans la même logique, une autre possibilité, celle du rétablissement des brevets anciens tombés en désuétude. Mais le Ministre refuse tout net ces brevets de résurrection[7]. Il refuse «qu'un objet du domaine public, qui aurait cessé d'être exploité en Belgique, puisse faire l'objet d'un brevet», et les seules catégories présentes dans son projet de loi sont les brevets d'invention, de perfectionnement et d'importation. Il introduit à l'inverse, comme clause de nullité, le défaut de nouveauté, et en particulier l'existence antérieure d'une description de l'invention dans un ouvrage ou recueil imprimé et publié.

Cette divergence témoigne d'un changement d'optique et d'une philosophie différente du brevet d'invention. Le Ministre de l'Intérieur Charles Rogier se réclame en effet explicitement de «l'ouvrage très remarquable publié en France par M. Charles Renouard»[8]. Pour lui, il y a ici deux intérêts à protéger et à concilier, «l'intérêt des inventeurs qui ont droit à jouir de leur invention», et «l'intérêt du travail national, qui se confond avec l'intérêt de la société, à faire usage des découvertes publiées». Le projet gouvernemental fait alors de la nouveauté la condition du brevet, ce que retiendra aussi la loi promulguée en 1854.

Le projet de la commission repose de fait sur d'autres bases. Pour une part, il accepte la philosophie du monautopole, qui est bien de multiplier les industries protégées de la concurrence, en posant comme condition de l'industrie l'existence d'une protection, et en mettant alors hors la loi tous les imitateurs, ceci en complète contradiction avec la longue dissertation historique et philosophique de Tielemans. Mais pour une autre part, il relève d'une conception plus ancienne, toujours vivante à l'époque et présente dans les débats parlementaires, celle qui consiste à attirer dans les frontières du royaume des industries nouvelles pour renforcer le «travail national», en mettant donc l'accent sur l'introduction en Belgique des inventions, et sur leur exploitation.

L'évolution de la loi - et des débats - sur la question des brevets d'importation est ainsi significative. Dans l'avant-projet de la Commission, alors que la majorité des Chambres de Commerce consultées sont contre tout brevet d'importation, ce type de brevet est jugé éminemment utile[9]. Il est donc maintenu, mais assorti de conditions particulières, ne donnant que le droit de produire et vendre en Belgique de manière exclusive, la production pour l'exportation restant libre, ainsi que l'importation de l'étranger pour usage privé. Le projet gouvernemental, dans un premier temps, aligne les brevets d'importation sur les brevets d'invention, donnant donc à ceux qui introduisent dans le pays une découverte brevetée ou exploitée à l'étranger les mêmes droits qu'aux inventeurs. Après discussion par la section centrale de la Chambre des Représentants, la formulation du gouvernement change; et c'est aussi un changement de la conception sous-jacente. Le brevet d'importation est toujours assimilé au brevet d'invention, mais réservé maintenant à l'inventeur d'origine (par alignement sur une innovation introduite la même année dans la législation anglaise), la durée étant alors fonction de celle des brevets accordés à l'étranger. C'est l'abandon de l'ancienne logique de «l'introduction» pour adopter une logique nouvelle, différente, celle de la reconnaissance unilatérale d'un droit de l'inventeur, même étranger; les brevets d'invention ou d'importation étant cependant frappés de nullité en cas de non exploitation.

Pierre-André Mangolte

----------------------------------------

[1]  Voir les notices biographiques sur Jobard et Tielemans, ainsi que Création de la propriété intellectuelle (1843) et Nouvelle économie sociale ou monauto-pole industriel, artistique, commercial et littéraire, (1844).

[2]  Dans la commission, quand il fallut fixer la durée du droit exclusif de l'inventeur, Jobard proposa - à titre de compromis - une durée de 100 ans plutôt que la perpétuité, mais il fut le seul à voter pour cette proposition; et il n'y eut qu'une Chambre de Commerce, celle d'Alost, à se prononcer pour une durée de 90 ans, accompagnée cependant d'un système de licences obligatoires en faveur des industriels belges; trois autres Chambres de Commerce à l'inverse trouvaient que 20 ans, c'était déjà beucoup trop long.

[3]  Tielemans analyse en détail la loi de 1791, et explique les contradictions de la situation - recréer un privilège alors qu'on venait de les abolir - et celles du chevalier de Boufflers à l'Assemblée Constituante, lequel évoque la propriété, tout en ne prévoyant qu'un privilège temporaire. C'est cette incohérence, écrit Tielemans, corrigée en partie dans la loi de 1844, «qui a ouvert la voie aux prétentions du monautopole».

[4]  Ce qui n'est pas, comme disait Mr de Boufflers, le résultat d'un contrat ou une concession de la société, car affirme Tielemans, cette propriété est une «institution première et divine ; Dieu l'a créée en même temps que l'homme» (p. 660).

[5]  Renouard range en effet les idées, les connaissances, les inventions dans ce qu'il nomme «le domaine universel immatériel», un domaine produit par l'ensemble de la communauté humaine, et non par Dieu, ou la Nature. Cf. Renouard, Du droit industriel dans son rapport avec les principes du droit civil sur les personnes et sur les choses, 1860, p. 209 et suivantes. Voir aussi Xifaras, La propriété, étude de philosophie du droit, 2004, p. 386 et suivantes.

[6]  Comme on le voit, là encore Sa présence est visible, et Tielemans évoque la «fonction providentielle» de la concurrence. «Elle [la concurrence] est plus encore, et ici se montre bien le droit de Celui qui veille sur l'humanité, l'intérêt crée la richesse et la concurrence la répartit»(p. 662). Ce qui chez Adam Smith est «main invisible» et concurrence des capitaux, est ici œuvre téléologique directement inscrite dans les desseins de la Providence.

[7]  En France lors du vote de la loi de 1844, l'industriel Christofle avait proposé la même chose. Voir sa brochure : Examen du projet de loi sur les brevets d'invention, F. Didot frères, fils et Cie, Paris, 1844.

[8]  Il s'agit en l'occurrence de son Traité des brevets d'invention paru en 1825, réédité en 1844.

[9]  L'origine de ce type de brevets est la loi anglaise qui pose comme principe, depuis l'origine, que tout ce qui n'est pas exploité dans le pays est, par rapport au pays, comme n'existant pas. Voir le rapport Vermeire qui cite assez longuement sur ce point Renouard.